Dans une société française atomisée, aux valeurs devenues floues et en proie au doute constant, les corps intermédiaires ont une responsabilité importante. En ce début d’année, nous, experts comptables, n’échappons pas à cette exigence.
Pour la profession, cela consiste avant tout à faire le choix du réalisme en regardant la société telle qu’elle est et non telle que nous la rêvons. En un mot, si vous me passez la formule, cela consiste à ne pas se raconter d’histoires. Et, sur ce point, force est de constater que le compte n’y est pas. On entend encore trop souvent ces discours passéistes qui, avec une touche de paternalisme, nient la réalité vécue par les confrères.
Alors, pour envisager sereinement notre avenir commun, il nous faut établir lucidement et froidement un diagnostic partagé et oser admettre des vérités simples :
- oui, le métier d’expert-comptable est déjà partiellement déréglementé et tendra à l’être intégralement dans les prochaines années ;
- oui, le métier de commissaire aux comptes sera réservé à 1500 professionnel dans les prochaines années ;
- oui, de ce constat, il faut tirer les conséquences, dont la première est la séparation réaffirmée des deux métiers et, surtout, des deux instances ;
- oui, nos instances ne sont plus représentatives de la profession, notamment en ce qui concerne les petits cabinets ;
- oui, nos élus se sont révélés incapables d’imaginer de nouveaux marchés ;
- oui, à l’heure des réformes territoriales tous azimuts, nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réorganisation des instances qui régissent notre profession, c’est l’objet de ma proposition pour les compagnies régionales, qui a ému nombre d’entre-vous, et demain pour les conseils régionaux.
Que nous cessions d’être une profession réglementée n’a rien d’effrayant, pourvu que nous soyons capables d’évoluer collectivement vers une profession organisée, c’est-à-dire forte de ses valeurs et de ses savoir-faire, structurée et fière de son identité. Nous disposons d’atouts considérables, dont notre diplôme, notre positionnement, notre maillage territorial sans équivalent et notre connaissance des acteurs économiques. Sur ces points, personne ne peut concurrencer l’expert-comptable.
Alors, cessons de regarder uniquement vers le passé et osons affronter collectivement le présent. Nous avons perdu des mandats et des marchés, notamment du fait de l’incapacité de nos élus à les défendre et à les faire évoluer. Soit, prenons-en acte pour apprendre de ces erreurs et ne pas laisser passer d’autres opportunités.
Avec les membres de Visions d’Experts, nous avons élaboré des propositions dont nous souhaitons l’examen rationnel. Ce n’est qu’au prix de cette approche stratégique, qui nous conforte et nous élève, que nous retrouverons une posture ambitieuse et une profession fière et conquérante.
Je vous souhaite à toutes et à tous une excellente année 2016.
Stéphane Benayoun